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Crash du vol MH17, points importants du rapport du 13 octobre 2015

Au bout de quinze mois d'une longue attente, le rapport sur le crash du vol MH17 de la Malaysia Airlines a été rendu public le 13 octobre 2015. Il donne enfin des informations de base sur les radars, la trajectoire précise de l'avion, les conversations des pilotes, etc. Mais il ne dit pas la vérité sur un point important qui est l'angle entre l'avion et le missile, permettant de savoir si le missile a été tiré d'une zone gouvernementale ou anti-gouvernementale.

Le rapport se présente sous la forme d'un fichier PDF de 279 pages, auquel il faut ajouter huit fichiers annexes, plus une vidéo de 19 minutes contenant un graphique très suspect qui nous sera notre point d'orgue. Ils sont disponibles sur le site officiel de la commission d'enquête néerlandaise1. Ce rapport est fortement contesté par la société russe d'armement Almaz-Antey dans la conférence de presse de 3 heures qu'elle a donnée mardi 13 octobre2.

Sommaire
Carte de la région
Abandon total de l'hypothèse du chasseur
Pas de satellites, pas d'Awacs, pas de radars primaires
La trajectoire exacte
La Malaysia Airlines optimise le fuel
L'exclusion du survol de la Crimée contribua à la catastrophe
Les compagnies américaines ne survolaient plus l'Ukraine
Les pillages
L'angle entre le missile et l'avion
Reconstitution par Almaz-Antey
Contradiction concernant l'angle dans le rapport néerlandais
Notes

Carte de la région [Modifier]

Carte montrant la région, avec l'avion au centre, les deux zones où pourraient se trouver les Buk, et le tracé de la frontière en orange des zones contrôlées par Kiev et par les séparatistes le 17 juillet 2014.

Abandon total de l'hypothèse du chasseur [Modifier]

Trois fragments du missile qui a touché l'avion ont été retrouvés.
Les enquêteurs sont absolument certains que l'avion n'a pas été abattu par un chasseur qui aurait suivi le Boeing, et l'aurait mitraillé et/ou l'aurait touché avec un missile air-air. Les trois arguments principaux contre cette hypothèse sont : 1. Les trous auraient été différents, sans doute plus ronds. 2. Aucun projectile embarqué sur un chasseur ne possède de projectiles ayant une forme de nœud papillon, comme ceux qui se sont logés dans le corps de quelques victimes. 3. Des morceaux d'un missile Buk ont été retrouvés, et leur peinture correspond à celle qui se trouve sur certains débris.

Cette hypothèse avait été évoquée par des témoins et avait été émise par le lieutenant-général russe, Andrei Kartapolov, lors d'une conférence de presse le 24 juillet 2014, quand il avait constaté que l'écran radar montrait deux points distincts. Maintenant, tout le monde, y compris l'armée russe, pense que le radar ne montrait pas le Boeing et un chasseur, mais plutôt deux gros fragments du Boeing après l'explosion.

Pas de satellites, pas d'Awacs, pas de radars primaires [Modifier]

Image publiée sur Twitter par US Mission to NATO le 22 juillet 2014, qui reprend une photo de Digital Globe de 2010 avec les trajectoires supposées du MH17 et du missile.
Deux AWACS trop éloignés.

Les enquêteurs ne parlent pas de photos satellites.

Il semble qu'il n'y en ait pas eu. La seule photo satellite connue a été publiée par US Mission to NATO sur Twitter. Elle se base sur une photo de 2010, et ne comporte aucune information pour justifier les traits qui y ont été dessinés.

Les deux AWACS les plus proches survolaient la Pologne et la Roumanie, mais n'ont rien vu.

Pas de radars primaires ukrainiens.
Le plus étonnant est que l'Ukraine n'aurait eu aucun "primary radar" en fonctionnement ce jour-là dans le Donbass. Il n'y aurait eu qu'un radar secondaire, c'est-à-dire un radar qui est capable d'écouter pour récupèrent des informations émises par un transpondeur, mais qui n'est pas capable de voir le ciel. Le rapport dit seulement que les radars primaires étaient en maintenant. Mais étant donné le grand nombre de missions militaires aériennes et la pauvreté de l'Ukraine, on pourrait imaginer que le ministère de la Défense ait momentanément réquisitionné les radars primaires de l'aviation civile.

La trajectoire exacte [Modifier]

La boite noire (orange) est française (du moins l'inscription sur son étiquette).
Trajectoire au-dessus des zones d'exclusion
Trajectoire du Boeing et des avions de lignes voisins

La trajectoire a été établie avec précision grâce à l'enregistrement des données du GPS réalisé toutes les 4 secondes. Finalement, l'avion ne s'est pas beaucoup éloigné de son plan de vol.

On note que l'avion était en train de tourner un peu vers le sud pour se remettre dans le milieu du couloir aérien L980 quand il a été touché. Les autres avions volent plus haut (FL350 et FL400).

Connaître la localisation géographique exacte de l'avion au moment de l'impact est très important pour déterminer l'origine du missile. Or, cette localisation semblait douteuse dans le rapport préliminaire parce que les débris ont été retrouvés au nord du Boeing alors que le missile a touché le côté nord, et aurait donc dû pousser des débris vers le sud. Il y a même des débris qui sont tombé en arrière par rapport à la position de l'avion, alors qu'à cause de la vitesse initiale, on se serait attendu à ce qu'ils tombent tous en avant du point d'impact.

Répartition des débris.

Le retour en arrière des débris, de la zone orange par exemple, s'expliquerait par le vent (qui serait du sud-ouest en altitude, et du nord-est au sol, donc pouvant être du sud-est à moyenne altitude). L'avion aurait aussi tournoyé sur lui-même suite au choc. De plus le doute n'est plus de mise, depuis que ce rapport dévoile un extrait intéressant des données de l'enregistreur de vol (FDR ou Flight Data Recorder) qui semble fiable et cohérent.

Dernière données avant l'impact.
Extrait de données de l'enregistreur de vol.

Voici donc les données principales de l'avion lorsqu'il fut touché. La direction est 115 degrés avec une dérive de 4 degrés, ce qui équivaut à un angle de 111 degrés.

La Malaysia Airlines optimise le fuel [Modifier]

Zones sous la responsabilité de l'Ukraine et conversation sur le refus de monter plus haut.

Economies de carburant.
Erreur de 100 kg sur le poids du carburant.

La route au-dessus de Donetsk n'est pas la plus courte pour aller d'Amsterdam à Kuala Lumpur. Mais au sud, il y avait ce jour-là de gros nuages orageux, et encore plus au sud, le survol de la Crimée n'était pas permis. Le contournement de la zone orageuse ne pouvait donc se faire que de deux manières : soit en passant au nord, soit en montant plus haut. Mais l'équipage a refusé de monter, sans donner d'explication.

Au paragraphe 3.3.2, le rapport émet l'idée que la compagnie a privilégié la "fuel efficiency" (et ce souci d'économie pourrait être aussi une des raisons de la disparition du vol MH370 dans l'océan indien).

Au paragraphe 2.11.6, le rapport note que l'avion avait assez de carburant pour se permettre de monter tout en conservant une marge raisonnable. Les enquêteurs remarquent que la Malaysia Airlines a un peu triché en notant 100 kilos de carburant de plus qu'elle n'avait en réalité.

L'exclusion du survol de la Crimée contribua à la catastrophe [Modifier]

EUROCONTROL exclut le survol de la Crimée

L'exclusion du survol de la Crimée est officiellement enregistrée dans la NOTAM (NOtice To AirMen) 0569/14 émise le 3 avril 2014. Le rapport l'évoque au paragraphe 2.9.3, puis relate l'historique de cette exclusion au paragraphe 5.2. Après le référendum du 16 mars suivi deux jours plus tard par le détachement de la Crimée, la Russie demanda à prendre en charge le contrôle aérien. L'Ukraine refusa. EUROCONTROL recommanda alors fortement aux compagnies aériennes d'éviter le survol.

Les compagnies américaines ne survolaient plus l'Ukraine [Modifier]

Les Etats-Unis déconseillent le survol de toute l'Ukraine

Au même paragraphe 5.2, le rapport rappelle la forte mise en garde des autorités américaines à leur compagnies aériennes concernant le survol, non seulement du Donbass et de la Crimée, mais aussi du reste de l'Ukraine.

Les pillages [Modifier]

En passant, le rapport indique que de très nombreux téléphones portables ont été récupérés et qu'aucun SMS n'a été envoyé pour informer les personnes extérieures à l'accident. Cela contredit une rumeur de pillage. Néanmoins, le rapport indique que des rouleaux de tissu ont disparu. Il peut s'agir d'un vol ou d'une personne qui aurait mis ces rouleaux à l'abri en attendant qu'on les lui demande, ou bien peut-être ont-ils été volés dans un lieu de stockage ukrainien ou autre entre le site et les Pays Bas.

L'angle entre le missile et l'avion [Modifier]

Hypothèse ukrainienne d'un azimut (déviation horizontale) de 17 degrés.

La détermination de l'angle entre le missile et l'avion est très importante car elle va permettre de localiser la zone d'où est parti le missile. En effet, l'ingénieur en chef d'Almaz-Antey, en réponse à une question, a précisé que le lanceur devait se trouver à une distance comprise entre 10 et 25 kilomètres, avec un maximum exceptionnel de 30 km, et que le missile lui-même ne peut se tourner que de 2 à 4 degrés, avec un maximum exceptionnel de 6 degrés. Le vent peut aussi dévier le missile, mais seulement d'une manière très faible puisque le missile vole à 600 mètres par seconde (2160 km/h ou 2 fois la vitesse du son) et ajuste sa trajectoire pour atteindre le point prévu.

Les enquêteurs expliquent qu'ils se sont surtout concentrés sur la question de savoir quel type de missile avait été employé. Ils ont donc fait de nombreuses hypothèses qu'ils ont testés avec de nombreuses simulations informatiques. Ils ont finalement conclu que ce ne pouvait être qu'un missile 9N314M. La société Almaz Antey est tout à fait d'accord avec cette conclusion à laquelle ils arrivent par un moyen beaucoup plus simple puisqu'ils savent que les projectiles en forme de nœud papillon n'ont été fabriqués que pour ce type bien précis de missile. Les enquêteurs ne disent pas pourquoi ils ont choisi pour hypothèse de départ un angle de 17 degrés. Elle correspond à la thèse émise par le ministère de la défense ukrainien qui annonçait dès le lendemain de l'incident que le fautif était un lanceur Buk vu dans l'agglomération de Snejnoe-Torez.

Lors de sa conférence de presse le 13 octobre 2015, la société russe d'armement Almaz-Antey a contesté vigoureusement l'angle de 17 degrés. Elle explique que les projectiles ne sont pas disposés de manière sphérique autour d'une charge explosive, mais de manière cylindrique. Ils ne se répartissent pas uniformément dans l'espace. Ils touchent la cible latéralement par rapport au missile.

Si le Buk avait formé un angle de 17 degrés, alors les projectiles seraient entrés sur le côté et seraient ressortis sur le côté.

Les flèches blanches montrent la trajectoire des projectiles si le missile avait eu un angle de 17 degrés. Or le côté opposé de l'appareil n'est presque pas troué.
Les alignements de plusieurs trous permettent de connaître les trajectoires des projectiles, qui sont représentées par les flèches vertes sur l'image de gauche.

Le rapport ne parle pas de ces multiples perforations, bien qu'elles constituent des témoignages des trajectoires de certains projectiles. Cette absence de recherche de relations entre plusieurs perforations proches et alignées est difficilement compréhensible, à moins de penser que les enquêteurs ne seraient pas impartiaux et ne souhaiteraient pas changer leur thèse des 17 degrés.

Par ailleurs, le réacteur droit de l'avion a été touché, ce qui n'est possible qu'avec un missile faisant un angle important.

Reconstitution par Almaz-Antey [Modifier]

Hypothèse d'un angle important.
Reconstitution le 31 juillet 2015

Almaz-Antey a effectué une reconstitution dans la nature le 31 juillet 2015. Mais la commission d'enquête a refusé de prendre en compte cette expérience, ni même d'en parler. Pourtant c'était spectaculaire et un essai réel peut s'avérer plus intéressant qu'une simulation sur ordinateur.

Almaz-Antey pense que l'angle était de 33,5 degrés.

Contradiction concernant l'angle dans le rapport néerlandais [Modifier]

Résultats des simulations néerlandaises

Les enquêteurs néerlandais illustrent leur rapport avec plusieurs dessins où le missile fait un angle supérieur à 17 degrés. Par exemple, le schéma à gauche montre un angle d'au moins 25 degrés.

D'ailleurs les enquêteurs se contredisent en mettant en vert l'hypothèse d'un angle de 27 degrés quand ils montrent les résultats de plusieurs simulations.

Le film, réalisé par les enquêteurs néerlandais, montre un angle entre le Boeing et le missile qui est manifestement supérieur aux 17 degrés annoncés dans le rapport.

Et le plus troublant est cette image extraite du film à 11'49.

Le dessin en forme de bâton blanc presque vertical représente la trajectoire supposée du missile. Alors, le missile viendrait d'une zone à l'ouest de la zone en rouge. Les enquêteurs se contredisent.

La zone de lancement est dessinée en rouge. C'est un dessin similaire à celui de la page 144 du rapport, avec une différence très importante. Le dessin du film montre la trajectoire des derniers mètres du missile représentée sous la forme d'un bâton blanc qui passe juste à l'ouest de Petropavlika. Cette trace est absente du schéma dans le rapport. En la prolongeant, on n'atteint pas la zone en rouge, mais une région plus à l'ouest, dans la zone gouvernementale proche de la route nord-sud passant par Amvrosiivka (Амвросіівка/Амвросиевка). Cela confirmerait les affirmations d'Almaz-Antey.

Notes [Modifier]

1. Site du bureau d'enquête néerlandais http://www.onderzoeksraad.nl/.
2. Vidéo de la conférence de presse d'Almaz-Antey le 13 octobre 2015 : https://www.youtube.com/watch?v=KNKFb4KLy04


Catégorie : Actualité.